Le projet de loi dit « Macron » tendant à la déréglementation de plusieurs professions, et en particulier des professions juridiques, suscite le mécontentement des notaires, huissiers de justice, greffiers des tribunaux de commerce et des avocats aux barreaux (les avocats au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation étant a priori épargnés) .
En ce qui concerne le métier d’avocat, les raisons sont nombreuses mais on retiendra surtout la crainte de ses acteurs que le projet entame un processus de perméabilité de son périmètre réservé et qu’il remette en cause certains de ses principes essentiels.
L’avocat s’honore, ce qu’il fait également par son serment, d’une volonté et d’un statut d’indépendance et de liberté, mais aussi de discipline, d’éthique et bien entendu de compétence, le tout sous la surveillance et la protection des Ordres.
La crainte des avocats est qu’ouvrir peu à peu et toujours plus leur métier à des intervenants étrangers à cette culture et à ces principes bouleverse la profession, en la « marchandisant » au risque de susciter une forme de dumping financier, conçu pour attirer l’usager au prix d’ un service de moindre qualité.
Elle est encore que l’institution d’une catégorie d’ « avocats d’entreprise », salariés d’entreprises qui ne fournissent pas elles-mêmes des services juridiques, contrevienne aux éléments consubstantiels du métier d’avocat qui est fait d’indépendance et de liberté, jamais de subordination.
Au point d’ailleurs que pour contourner cette dernière difficulté, la loi interdirait en fait à ces « avocats d’entreprise » d’exercer la plaidoirie et la représentation de leur employeur. Quelle serait alors leur utilité ? Faire des juristes d’entreprises les titulaires d’un titre, celui d’avocat, dont ils ne pratiqueraient pas les activités et prérogatives les plus essentielles ? Une situation pour le moins incompréhensible et difficilement justifiable.
La question reste donc de savoir quel est l’intérêt que la déréglementation du métier d’avocat procurera.
Le gouvernement nous parle de création d’emplois. Mais on a du mal à l’imaginer.
En effet, la demande juridique ou la demande judiciaire ne changeront pas. Au mieux, elles se déplaceront d’un ensemble de professionnels vers de nouveaux venus. Des emplois seront donc perdus pour être compensés par d’autres. Somme toute, ce sera une opération à compte nul, avec un risque de dégradation des qualifications et donc des niveaux de rémunération…
Cette déréglementation ne convainc donc personne et il n’est pas inutile de rappeler que la Garde des sceaux n’y est quant à elle guère favorable, quand bien même, discipline gouvernementale oblige, elle s’y trouve soumise.
Le projet de loi sera examiné par les chambres. On verra bien ce qu’il deviendra à l’issue des débats.