Georges Marchais a été enrôlé de force par l’occupant en décembre 1942 pour travailler en Allemagne chez Messerschmitt à Augsbourg, en Bavière, à la construction du chasseur Focke Wulf 190. Il était âgé de 22 ans.
Elu trente ans plus tard secrétaire général du PCF, il devint la cible de toutes les critiques de ses adversaires.
Dans ce contexte il fut victime dès 1973 d’une sinistre manipulation visant à le discréditer en suggérant qu’il aurait été volontaire pour travailler aux côtés de l’ « ennemi ».
Deux anciens responsables communistes en rupture de ban, Charles Tillon et Auguste Lecoeur, se firent les interprètes dans les médias de cette calomnie.
A l’appui de leurs dires, Lecoeur fit publier dans la presse une copie falsifiée des papiers de travailleur de Georges Marchais, maquillée, après avoir été frauduleusement extraite des archives du ministère des anciens combattants dans des conditions obscures.
Georges Marchais déposa alors plainte pour faux et usage en écriture publique, visant la falsification de ses papiers. Il refusait de se situer sur le seul terrain de la diffamation parce que sur ce fondement le procès était techniquement gagné d’avance.
Il souhaitait que soit établie la falsification, et que puisse être recherchée la part prise par le pouvoir alors en place dans la manipulation.
J’ai eu l’honneur de participer avec Jules Borker, avocat de Georges Marchais avec Monique Picard-Weyl, à ce grand procès à la fin des années 70, qui s’est cependant terminé par la relaxe de ceux qui avaient publié ces faux au motif technique d’un problème de qualification. Acte sera donné à la défense qu’elle fut alors magistralement animée par notre grand confrère Michel Libersa, pénaliste talentueux. Acte lui sera également donnée qu’en cet état, Auguste Lecoeur, décédé en 1992, n’a jamais été jugé coupable des faits qui lui étaient reprochés et qu’il convient donc conformément à la loi de présumer qu’il ne les a jamais commis.
Sans contester que les papiers reproduits dans la presse étaient le produit d’une falsification, le tribunal puis la cour de Paris refusèrent en effet de suivre Georges Marchais au motif que la publication par voie de presse de ces documents constituait en fait un faux en écriture privée.
S’étant ainsi étrangement abstenue de requalifier d’elle-même l’infraction, la justice choisit ainsi d’exposer de plus fort l’opposant Georges Marchais à la polémique.
Au-delà de cette issue pénible, et des souvenirs amers qui peuvent s’y attacher, je conserve très fort le souvenir de cette audience devant le tribunal, au cours de laquelle Georges Marchais, personnage charismatique, avait du haut de sa grande stature cédé à l’émotion. Ses larmes sincères furent alors largement commentées par la presse nationale.